Le jeudi, c’est Léonie (44)

La vie en strapontin

Au début du confinement, en mars 2020, je me suis retrouvé, comme beaucoup d’entre-nous, tout bête. Désœuvré. Plus de public dans les salles (plus de salles, en fait…), plus de créations à venir, plus d’interventions auprès des interprètes… En plus de ça, je souffre d’asthme sévère depuis des années et – alors que personne ne savait rien finalement sur cette nouvelle maladie – les rumeurs allaient bon train sur la probabilité d’être très gravement touché.
Super ambiance.

J’ai toujours deux ou trois livres de poésies qui me servent de béquilles dans des situations compliquées. Une saison en enfer, Romances sans paroles et Les fleurs du mal.

Pour la première fois, j’ai lu ce recueil avec la volonté de me l’approprier. D’en proposer ma lecture. Mais là, c’était paradoxal : j’étais dans la perspective qu’il n’y aurait jamais aucun public pour écouter mes éventuelles mises en musique. Et pourtant mon désir de travailler sur ces poèmes était plus fort que tout. Sans aucune raison, juste pour avoir l’impression d’exister, je me suis mis à composer comme rarement je l’avais fait jusque là. Je me levais à 3h30 pour être à 4h à mon bureau. Je travaillais sans relâche jusqu’à 12h (c’est moi qui cuisine à la maison). Je me remettais au travail immédiatement jusqu’à 20h où on se retrouvait en famille pour 1. applaudir les soignants de notre jardin et 2. présenter ma composition (1 poème mis en musique par jour !) à Mme la Fée et à Léonard. Ce dernier était alors en CM2.
C’est raide Baudelaire en CM2. Chaque présentation de ma mélodie était alors précédée d’une analyse du texte.
C’était magique. Nous avons beaucoup pleuré, mais séchions assez rapidement nos larmes avec un film américain que nous regardions en mangeant de bonnes choses.

Et le lendemain, ça recommençait…

Durant cette drôle de période, on prenait des nouvelles des copains, on se faisait des apéro-visio… (pfff !). A l’occasion d’un appel à mon ami Eric Herbette, il me fait part de son travail du moment : un peu comme moi, il s’était mis à écrire des nouvelles. Sans raison particulière. Il me les envoyait une par une.

Alors, j’ai commencé à créer un petit groupe d’intimes et j’ai envoyé aussi chaque jour mes Baudelaire.

Une nouvelle d’Eric a fait tilt. Enfin, beaucoup ont fait tilt, toutes mêmes. Mais l’une d’elle La vie en strapontin résonnait avec ce que nous étions en train de vivre.

Ça raconte, avec le style toujours décalé d’Eric Herbette (j’ai commencé à décrire ce style, entre Queneau et Bioy Casares, mâtiné de Calvino avec une pointe de tendresse à la Marcel Aymé… mais ce serait encore trop réducteur), la pauvre vie d’un ouvreur de théâtre.

Et si on faisait de nos deux travaux respectifs une seule et même œuvre ?

C’est celle-ci qui sera créée mercredi salle de l’Institut (Orléans) à 19h30. Avec La bonne chanson (ensemble vocal, direction Marie-Noëlle Maerten), Sarah Chervonaz (contrebasse), Jérôme Damien (piano) et moi à la narration. A la sortie, on pourra rencontrer Eric Herbette et même découvrir ses livres.

Merci au conservatoire d’Orléans de nous faire confiance pour ce projet tellement intime qu’il m’est difficile d’en parler plus. Ce que je sais, c’est que c’est la meilleure musique que j’ai écrite de toute ma vie. Venez écouter pour vous en assurer !

 

 

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Et bien sûr, comme tous les jeudis, nous continuons notre cycle “Un an de chansons” autour des poèmes de Jean-Luc Moreau. Cette semaine, c’est rassurant, Léonard se dit qu’il a plein de choses à apprendre au collège  :

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